Message de L’évêque
JMJ 2019
Saint Gabriel- Ile Rodrigues
- Vendredi dernier lors d’une rencontre avec des jeunes du groupe 40 Linley fine pose ene question: Pourquoi tant de souffrance dans le monde? Est-ce que Dieu li insensible à la souffrance de certaines personnes ou de certains peuples?
Le psaume 21 qui nous fine médite ce matin semble faire écho a cette question. Ene la prière sous forme de cri: : « mon Dieu , mon Dieu pourquoi m’as tu abandonné? Le jour j’appelle et tu ne me réponds pas , mon Dieu; la nuit je ne trouve pas de repos. »
Un croyant- ene chrétien- li invité a entre en dialogue ( conversation) franc avec Bondié…..li exprime ce qui enan au plus profond de lui même…li pas faire semblant.. mais ene vrai dialogue implique aussi qui nous prend le temps écouté. Dans dans la prière écoute Jesus. Ce matin , Jésus , la Parole de Dieu, vine rejoindre l’interrogation de linley et nou bane propre questions par so passion lors la croix ( qui nous fine écouté et qui nous fine regardé) Qui nous tendé ? Qui nous fine voir?
Bondié gagne dimal letan nous gagne dimal.
Bondié souffert letan nous souffert.
« Les larmes de la veuve coulent sur les joues de Dieu » nous dit la Parole de Dieu.
Dieu , par la croix Jésus, vine rejoindre nous – hier comme aujourd’hui – dans nous souffrance ( physique, moral, existentiel) pou ouvert pou nous ene passage…ene simin la limiere, ene simin libération, ene chemin de vie. Li faire nous sorti de nous bande tombo.
C’est pourquoi, après la résurrection de Jésus, habité par l’Esprit saint , Pierre fine capave dire sa mendiant qui ti pe assise devant le temple ( mendiant d’argent, de reconnaissance et d’amour) : « au nom de Jésus le Zaraéen , réveille toi et marche. »
- Chers jeunes réunis devant la cathédrale…Bondie pas content zot à la manière d’ène grossiste..li pas content zot en gros, en tant que foule ( Jésus ti même, par expérience, méfié li bane la foule qui si facilement manipulable!! pas blié qui la foule qui ti enthousiaste a cause bane miracle Jesus fine abandonne Jesus 5 jours après à l’épreuve de la croix!) Jesus content chacun de zot personnellement … Jesus content ‘Chaque chacun’ qui présent dans cette foule de jeunes réunis ce matin devant la Cathédrale.
Toi jeune qui peut être découragé et porte dans to le coeur ene gros chagrin ; toi qui peut être pas enan confiance dans toi ou qui fine perdu confiance dans toi à la suite suite ene déception ou un échec scolaire; toi qui peut être complexé parce qui jamais pas valorise toi; toi qui fine vine addict l’alcool ou la drogue; toi qui pé vive peut être dans ene monde virtuel des réseaux sociaux et qui fine perdi contact réel avec to famille (to enne beaucoup friends mais pas d’amis ); toi qui peut-être pé vive bane contradictions et qui empêtré dans le mensonge; toi qui peut-être pas conné qui faire to vive lors sa la terre la ou que même si la vie enan ene sens….toi jeune , chaque jeune, Chaque chacun, Jésus dire toi ce martin : « Réveille toi et marche! »
Si to faire un peu attention mo sûr qui to pou d’accord avec moi que le Seigneur fine mette ek mette lors to chemin bane dimounes comme Pierre et Jean qui envie et qui fine prend toi par la main, faire toi debout et marché. Jeune rend grâce pour ces témoins de l’évangile lors to la route humaine . Enan bane adultes ( ene grand-parent, ene maman , ene religieuse ou ene prêtre, ene marraine, ene catéchistes ou ene professeur, ene responsable mouvement) ou banes jeunes comme toi par qui Jesus le Nazaréen prend toi par la main ek faire toi marché.
Sa causé « penan nanrien a faire » li pas dans pas dans vocabulaire Bondié
Bondie ouvert bane tombo, li ouvert banes passages… passage li ene l’autre mot pour pâques.
Cher jeune, cher Linley , Veronique, Stehan, Ingrid , toi qui la présent dans cette foule, est -ce qui to d’accord pou laisse Jesus prend toi par la main , réveille toi de ce qui paralyse toi et faire toi marcher ? marché lors la route de la responsabilité, de la fraternité, de la liberté . Est ce qui to d’accord pour faire confiance Jesus? Confiance c’est se fier, c’est cela la foi.
- Cher jeune, en tant que baptisé, Jésus appelle toi ek confié toi ene mission : li invite toi a être « Pierre » pour ton prochain.. â être « Pierre et Jean » pour celui qui est proche de toi dans to famille, to college, to village, to travail, sur les terrains de sport ou dans des regroupements culturels. Jesus le Nazaréen demande toi aussi en son mon tende la main droite a to prochain, aide li relever ek marcher……
Enan dans nous l’Eglise à Rodrigues de nombeux jeunes missionnaires qui agir au nom de Jesus:
Mo imagine entre autres a :
a) Sa l’équipe JOC de Montagne Charlo. Depuis 2 ans zot regroupé pou partage zot la vie en lien avec l’évangile. Au cours d’une réunion zot fine réfléchi lrs bane drain dans zot village.Bane drain ti bouché et sa ti capave amene inondation lestent nan cyclone et gros la plui Zot fine contacté Comite village ek mobilise villageois pou nettoye drain pou evite bane débordement. Zot fine permette zot village deboute et allée l’avant.
b) Ene tifi demande so maman prépare ene dipain chaque jour pour partage avec ene camarade so classe qui vive dans la misère et vine l’école l’estomac vide. Li faire sa avec Gene grand discrétion , sans publicité…c’est qui la main droite donné la main gauche pas besoin conné. Li pe aide so camarade marche vers so l’avenir.
c) Ene jeune qui fine gagne courage, au nom so la foi, dire non a une groupe camarades de so village qui ti harcèle psychologiquement ek boufonne ene dimoune dans village qui so la tête un peu fatigué. Li pas d’accord qui boufonne li pareil comme bane soldats fine boufone Jesus lors la croix.
d) Bane jeunes qui cette année encore fine porte zot volontaire pour anime bane rencontres dans des familles d’accueil. Des jeunes qui d’une manière plus permanent donne zot letemps et zot talents pou regroupe les autres jeunes ( JOC, Légion ,scouts, rassemblement paroissial comme jeunesse lumineuse..) pou zot vive ek approfondi ene l’amitié avec Jesus au sein d’un groupe d’Eglise. Bane jeunes donne zot letemps pour le camp des ados, pou catéchisme des enfants dans village, comme responsable des ACE, ou pou mette zot au service de la Communauté dans chorale, la liturgie, servant de messe etc Zot bane vrais missionnaire de Jesus.
e) Bane jeunes , au nom zot la foi en Jesus, fine decidé pou engage zot dans sacrement mariage. A travers ene l’engagement durable pou faire zot maximum pou bonheur zot conjoint, pou ene la vie de fidélité ,pou transmettre la vie ek fonde ene famille. Ces couples fine décidé pour être missionnaire de l’amour de Dieu.
Mo rende grâce au Seigneur de susciter tant de jeunes missionnaire.
La clé d’une vie réussie c’est une vie donnée. c’est le secret de la vie de Jesus.
4) En cette année de la mission laisse Jesus prend toi par la main pou réveille toi de to bane sommeil , de to bane paralysie pour qui to marche à sa suite…
En cette année de la mission sois témoin de Jésus en prenant tes amis par la main pour aide zot relevé ek marché…
Ene chrétien c’est être missionnaire. ( réalité synonyme)
Ene chrétien li pas ene poule mouillé.
Ene missionnaire n’a pas peur pour rendre compte so la foi. Li pas honté, en toute circonstance, dire que Jesus est so l’ami et li envie prend Jésus pou guide.
Ene chrétien li toujours en recherche et c’est pourquoi li pas isolé, li en équipe pou li prend au sérieux so la vie, pou li prend au sérieux l’Evangile et ainsi permette la limiere l’évangile éclaire so la vie .
Ene missionnaire li pas peur pou faire ene choix le dimanche pou nourri so personne de la Parole et du pain vivant et ainsi, avec la communauté, témoigné que Jesus vivant.
Ene chrétien donne so parole et li tini so parole dans so l’engagement. li pas laisse li dominé par so feeling, so caprice du moment et ainsi li entraine li pou que la parole donnée soit ene parole tenue.
Ene chrétien li reste fidèle a so bapteme, fidèle a l’appel qui li fine recevoir de Jesus. Li pas ene girouette qui changé la Kot divant soufflé , en fonction tendance,..la kot li pou gagne so l’avantage ( y compris financier ou autres).
Ene missionnaire , à l’exemple la Vierge marie ou Etienne le premier martyr chrétien ,na pas peur pou engage li même si la gane critique et ainsi li participe dans construction ene societe plus fraternel,plus juste, particulièrement envers bane plus faibles et respectueux de l’environnement ek .
Etre Chretien c’est être missionnaire . Etre missionnaire c’est perte chrétien.
Jeune , est-ce qui to d’accord pou témoigne de Jesus? Jesus croire dans toi et li compte lors toi.
Amen
Messe Chrismale 2019
Durant ce carême nous avons vécu dans de nombreux villages une belle expérience au sein des familles d’accueil. Expérience qui nous aide à mieux découvrir le vrai sens de l’Église ( Ekklèsia ) comme communauté (famille) rassemblée par Dieu notre Père, par la force de l’Esprit Saint, autour de Jesus. Ce fut l’expérience vécue par les premiers chrétiens en Palestine et en Syrie, à Corinthe et à Rome , expérience que nous décrit Luc dans les Actes des Apôtres.
Dans ma lettre pastorale de cette année, en me référant à l’expérience des premiers chrétiens, j’invite chaque fidèle, oint par le saint chrême au baptême, à vivre une expérience communautaire au sein d’un mouvement, d’un service, d’un regroupement paroissial, d’un groupe de partage d’évangile etc. Les Actes des Apôtres nous font découvrir que faire confiance en Jesus est une décision personnelle mais, toujours d’après les Actes des Apôtres, cette relation d’amitié avec Jesus est nourrie et se développe au sein de la vie communautaire . Par ailleurs, le don de l’Esprit Saint que nous avons reçu à notre confirmation par l’imposition des mains et l’onction d’huile sainte, fait de nous des missionnaires. Dieu nous appelle, chaque baptisé mais aussi en tant que communauté (Ekklèsia),à être missionnaire de sa Bonne Nouvelle. Missionnaire de Jesus le Christ qui réalise la prophétie d’Isaie en
« portant la Bonne Nouvelle aux pauvres, annonçant aux prisonniers qu’ils sont libres, aux aveugles qu’ils verront la lumière, apporter aux opprimés la libération”
Cet après-midi nous célébrons la messe chrismale, c’est-à-dire nous rendons grâce à Dieu notre Père pour Jésus le Zaraéen, le Christ, c’est-à-dire le Messie, le Sauveur. Nous avons été tous oint du saint-chrème – cette huile consacrée par l’évêque au cours de la messe Chrismale – afin de recevoir la force de l’Esprit Saint qui, telle la force du vent, fait de nous une Église en sortie. Comme les Apôtres et les femmes après la Pentecôte, nous sommes invités à sortir à la rencontre des personnes sur les différents terrains où se joue l’avenir de notre humanité – la famille, le travail, les loisirs, la culture, la politique, la protection et le droit des enfants, les enjeux environnementaux – pour être missionnaire du Christ. Oui, à l’exemple de Pierre et de Jean, nous sommes invités à témoigner de Jesus le Zaraéen, celui qui, aujourd’hui comme hier, nous dit « réveille, toi, et marche ». Témoigner comme Pierre par nos actions concrètes – en prenant nos frères et soeurs par la main droite et en les soulevant – mais aussi en rendant compte de notre foi en Jesus, Celui par qui nous agissons.Rendre visible Jesus qui, hier comme aujourd’hui, tel un aimant , nous attire et nous invite à vivre de sa relation filiale avec Dieu son Père et notre Père et à vivre de sa relation fraternelle avec nos prochains c’est à dire avec ses frères et soeurs. C’est tout le sens profond de la croix: Jesus élevé et écartelé sur la croix afin de reconstruire cette unité rompue par le péché. C’est de cela – ces relations renouées – dont nous faisons mémoire à chaque messe et que nous sommes invités à actualiser dans chacune de nos vies, c’est-à-dire dans notre manière d’être et de faire. Nos paroles de foi doivent s’incarner dans des actions concrètes tout comme nos paroles de foi doivent exprimer ce que nous tentons de vivre. C’est la mission confiée par appel à tous les baptisés, à toute l’Église, c’est-à-dire à nous tous.
Frères et sœurs, en cette messe chrismale où nous proclamons notre foi en Jesus comme Christ , prions pour que nous vivions les uns et les autres une vraie conversion missionnaire et ainsi répondre à notre vocation de baptisés, à ce pourquoi Jesus a institué l’Église à la Pentecôte : rendre visible son action invisible mais combien réelle au cœur de l’histoire humaine et de l’univers.
Cet après-midi, en cette messe Chrismale, nous rendons grâce spécialement pour les prêtres , qui en communion avec l’évêque, sont ordonnés au service de la Communauté. Par la puissance de L’Esprit Saint ils sont appelés par le Seigneur lors de leur ordination , à la suite des 12 apôtres, à annoncer la Parole , à présider les sacrements et à guider la communauté sur les pas de Jésus le Bon Pasteur. Les yeux fixés sur Jesus le Bon Pasteur, ils sont appelés, au nom de leur sacerdoce ministériel , à se mettre au service du sacerdoce commun de tous les fidèles en les encourageant, en les interpellant et en veillant à l’unité du peuple de Dieu . Là encore, la méditation des ‘Actes des Apôtres’ est une école de formation extraordinaire afin d’être prêtre à la manière des apôtres et ainsi se mettre au service des différentes vocations dans l’Église, vocations complémentaires et si nécessaires en vue de la mission.
Je voudrais chers frères et sœurs vous inviter à encourager nos prêtres. Ils ont besoin de votre soutien comme vous avez besoin de leur soutien. Ils ont besoin de votre accueil comme vous avez besoin de leur accueil. N’hésitez pas à les interpeller fraternellement comme ils sont aussi appelés à vous interpeller. Encourageons-nous les uns les autres, valorisons-nous les uns les autres, et surtout, comme Jesus nous invite : aimons-nous les uns les autres.
Je voudrais ce soir remercier mes frères prêtres pour toute leur collaboration, leur fraternité et leur générosité au service de l’Église de Jésus et de sa mission. Je vous souhaite ‘la joie de l’Évangile.’ En effet, et Jésus nous le dit dans le livre des ‘Actes des Apôtres’ : « il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir. », c’est-à-dire que c’est dans cette sortie de nous-même , dans ce don de nous-même comme pasteur, que nous communions à Jesus le Bon Pasteur et que nous expérimentons le vrai bonheur, la vraie joie.
Je voudrais ce soir accueillir d’une manière spéciale le père Joseph qui est en mission à l’Île Rodrigues et qui participe pour la première fois à cette messe chrismale à Saint Gabriel , loin de sa grande Île natale, Madagascar. Je demanderais au père Wilbert de bien vouloir transmettre la reconnaissance et les remerciements de l’Église qui est à Rodrigues aux supérieurs de la Congrégation des Spiritains. Nous sommes cet après-midi en communion de prières avec les deux prêtres Rodriguais, le père Luc René et le père Lelio, qui sont en mission respectivement en Chine et à l’Île Maurice. Prions aussi pour notre séminariste Jean Rex qui poursuit sa formation à Nantes en vue de venir rejoindre père Alex et père Daniel comme prêtre au service du Vicariat Apostolique de Rodrigues.
Je voudrais saluer la présence de nombreux servants de messe parmi nous cet après-midi. Comme engagement ,chers jeunes, vous vous mettez au service de la liturgie où, à chaque messe ,Jesus se fait pain et nous parle cœur à cœur et vient ainsi demeurer en nous. Si jamais vous sentez l’appel de Jésus, tout comme l’appel qu’il a adressé aux apôtres, à tout quitter pour le suivre comme prêtre , je vous donne un conseil, comme un grand-père donne à ses petits-fils : répondez avec toute la générosité de votre jeunesse à cet appel de Jésus car une vie toute donnée comme prêtre est une belle manière de réaliser son humanité et sa vocation de baptisé. Nous tous membres de l’Église, Corps du Christ pour parler comme saint Paul dont nous pouvons suivre le dynamisme missionnaire dans les Actes des Apôtres,encourageons nos jeunes par notre prière, par la transmission de la foi, l’encouragement et surtout par notre propre recherche de cohérence, à réponde a l’appel de Jésus.
Amen.
Vous revenez de la conférence sur les abus sexuels sur les mineurs et les individus vulnérable, tenue à Rome du 21 au 24 février dernier. Vous y représentiez la CEDOI. Que retenez- vous de cette rencontre en terme de sentiment, d’ambiance?
Ce ne fut pas une rencontre mondaine de personnes heureuses de se retrouver à Rome pour discuter sereinement de morale ou de théologie ! Ce fut une rencontre empreinte de gravité, de chagrin et nous étions tous un peu KO. Nous avons pris le temps d’écouter les victimes et ce fut des moments d’émotion et d’indignation, de chagrin et de honte. Comment cela est-ce possible entre frères et sœurs de notre Eglise bien aimée, particulièrement comment expliquer de telles horreurs envers les enfants et des innocents ? Comment et pourquoi tant de souillure? Il faut être clair. Lorsqu’il est question de pédophilie, de viol de mineurs le mot abus me semble faible. Dans ces derniers cas il me semble qu’il nous faut désigner ces perversions comme des actes criminels car il s’agit de la transgression des interdits qui permettent une vie humaine digne en société. Au cours de cette rencontre j’ai aussi beaucoup pensé à cette grande majorité de prêtres pour qui leur mission est un vrai sacerdoce et qui l’exerce avec tant de générosité. À cause de certains et d’un système, donc des responsables hiérarchiques qui ont couvert ces actes ignobles, tant de prêtres vivent actuellement une grande épreuve. Il nous faut les soutenir et les encourager à persévérer dans leur mission.
Et quelles idées fortes dégagez-vous ?
Ce fut aussi un moment de grande prise de conscience de la gravité de la crise que traverse l’Eglise et qu’aucun continent n’est à l’abri de telles perversions de la part des clercs, d’où la nécessité d’être vigilant.
Par ces scandales, la lumière de l’Evangile est mise sous le boisseau. Des pasteurs sensés protégés les brebis se sont comportés comme des loups féroces, des prédateurs. Pour être à la hauteur de la mission que Jésus confie à son Eglise, il nous faut vraiment crever l’abcès, aller à la source du mal, même si j’emploie cette expression avec précaution car il s’agit de personnes et particulièrement de victimes qui sont souvent profondément blessées dans leur corps, leur psychologie et dans leur coeur de croyant.
Il nous faut développer une priorité des priorités: la protection des mineurs dans toutes les instances de l’Eglise et la défense des victimes. C’est notre défi et ce que Jesus attend de nous, nous qui portons le trésor de l’Evangile dans des vases d’argile.
Parlez-nous des décisions ……
Il nous faut, pour vivre une vraie conversion, être à l’écoute des victimes et dans toute la mesure du possible, les offrir tous les moyens possibles pour un chemin de guérison. Il nous faut également les écouter pour pouvoir vraiment et sincèrement proposer et promouvoir des mesures concrètes pour que de tels drames ne se reproduisent plus. Concernant nos îles de la CEDOI il nous faut veiller que toutes les décisions prises – c.f le protocole pour la défense des mineurs – soient mises en œuvre et nous devons rester toujours vigilants. En fonction du contexte qui évolue si vite il nous faudra évidemment régulièrement l’actualiser. Ces mesures doivent être mises en place, c’est une urgence, dans tous les diocèses de tous les continents. Par ailleurs, je suis favorable à ce qu’il y ait un code de déontologie concernant notre manière de vivre notre ministère ainsi que la vie religieuse.
Au delà de ces mesures, il nous faut veiller à ce que dans notre manière de vivre en Eglise il y ait un plus grand partage de responsabilités. Dans toutes les instances de l’Eglise Il nous faut veiller à ce qu’il y ait une plus grande participation des femmes- religieuses et laïcs – dans le discernement mais aussi dans les prises de décision. Si l’Eglise n’est pas une démocratie, elle n’est pas non plus une théocratie! Immense chantier afin de promouvoir une Eglise de communion où tous sont responsables même si évidemment il a des responsabilités différentes. L’autoritarisme devrait être une alerte à prendre en compte car elle entraîne toutes sortes d’abus y compris sexuels. Je pense par ailleurs qu’il ne doit pas avoir de sujets tabous. Dans mon rapport envoyé au secrétariat de cette rencontre mais aussi lors d’une intervention au sein de mon groupe de réflexion au cours de la conférence j’ai fait la proposition suivante: qu’il y ait une étude approfondie pour analyser si il y aurait un lien entre le célibat et ces scandales ou encore si il y aurait un lien entre certaines conditions dans la manière de vivre le célibat et ces dérives ? De nombreuses questions concernent également la formation dans certains séminaires ou au sein de certaines communautés nouvelles ne peuvent pas être évitées.
Certains sont marqués par le scepticisme : l’Eglise a l’habitude de l’omerta, ce sera difficile pour elle de s’en défaire, disent-ils. Difficile aussi de se départir de la solidarité ecclésiale, de faire voler en éclats l’image de l’Eglise.
Avez-vous eu ce sentiment que ce sont la des attitudes qui ont toujours cours ? Ou alors que l’Eglise se reconnait en crise, qu’elle veut se reformer en gardant les yeux sur la vérité, la justice, la crédibilité ……..
Je peux comprendre ce sentiment car trop longtemps la hiérarchie et les responsables religieux ont voulu protéger la réputation de l’institution au détriment des victimes. Par ailleurs un réflexe corporatiste, comme il existe partout, a certainement protégé des abuseurs. C’est une faute grave et il faut le reconnaître. Il nous faut surtout changer cette manière de faire et prendre les décisions nécessaires pour éliminer ce fléau. Ceci dit, il est vrai souvent sous la pression des victimes et des médias, l’église est une institution qui se remet en question en profondeur et il faut ici saluer le courage et la détermination du pape François. Bien d’autres institutions devraient en faire de même car malheureusement les abus sur les mineurs est un problème qui touche l’ensemble de la société. Je me pose souvent cette question : es-ce un fléau concernant uniquement la religion catholique ? Est-ce que les autres églises et institutions (religions, ONG, clubs sportif) ne sont pas confrontées à ces mêmes scandales ? Néanmoins, dans un monde où tant d’enfants sont victimes d’inceste, (en très grande majorité au sein des familles) du fléau du tourisme sexuel, de l’industrie de la pornographie, des guerres et de la misère, il est normal que la société soit plus sévère avec la religion catholique qui est une référence morale importante. Comment répondre à l’attente de la société et à la vocation que Jésus nous confie? Ayons le courage de faire la vérité, même si cela fait mal, et surtout, sans tarder, Il Nous faut mettre en pratique partout dans le monde les 7 priorités décidées par le pape suite à cette rencontre mais aussi d’autres initiatives sont à prendre par les Conférences Épiscopales en fonction des contextes particuliers.
Par ailleurs, de nombreuses personnes, dont les victimes, pensent que l’Eglise ne prend pas les décisions disciplinaires suffisantes concernant les agresseurs. Il est vrai que dans ce domaine également il y a eu des dysfonctionnements graves et même la réalité des faits rapportés au pape a été déformée dans certains cas. Néanmoins le temps de la justice n’est pas non plus de temps de l’actualité journalistique. La justice ne doit pas être expéditive. Elle doit aussi tenir compte des droits de celui qui est soupçonné de délits si graves pour ne pas ajouter de l’injustice à l’injustice. Il faut donner le temps à la justice civile et à la justice ecclésiastique même si entre temps le clerc en question doit être éloigné de tout ministère public et de tout contact avec les mineurs.
Faire la vérité, veiller à ce que la justice soit faite, responsabiliser le peuple de Dieu, vivre une conversion en profondeur, accueillir le pardon de Dieu, voilà le chemin à prendre pour que l’Eglise soit ‘tablette lors qui repose la lampe l’Evangile.’
Quelle suite concrète à votre participation ?
En tant qu’évêques de la CEDOI nous avons à Nous entraider pour promouvoir une Eglise où les mineurs soient en sécurité mais aussi tout faire pour que nos communautés soient un signe humble et prophétique que chaque enfant et chaque mineur est un trésor et un don de Dieu à respecter absolument. Nous devons pour cela aider nos prêtres dans l’exercice de leur ministère par notre soutien fraternel et leur donner des occasions de relecture dans la foi de leur ministère de service. En tant qu’évêques nous sommes également invités à collaborer avec le pape François pour cette réforme en profondeur de l’Eglise qui en fait est la mise en œuvre de la vision du Concile Vatican 11.

Qui dit conversation dit écoute et partage.
Le cardinal Maurice Piat, ce disciple de Jésus, est celui- qui en lien avec les évêques de la CEDOI- a su écouter les aspirations des chrétiens de Rodrigues et fait la demande au pape Jean Paul II pour que l’Eglise qui se trouve à Rodrigues soit reconnue dans son originalité. Il a cru en la maturité de l’Eglise qui se trouve à Rodrigues à entrer, comme adulte, dans cette conversation avec Dieu et ainsi à enrichir la catholicité d’une nouvelle voix. Je voudrais, une fois de plus remercier, notre Frère Maurice d’avoir cru en nous. Nous sommes tellement heureux qu’il soit parmi nous cet après midi pour présider cette Eucharistie, alors qu’en cette fête de l’immaculée Conception, nous célébrons le 14 anniversaire du Vicariat Apostolique de Rodrigues.
Le cardinal Maurice Piat a toujours cru en les capacités du peuple Rodriguais. Il a apporté sa contribution pour la réussite de l’autonomie, entre autres en encourageant les laïcs dans leur engagement au sein de la société mais aussi par une lettre pastorale, écrite conjointement avec Mgr Ian Ernest, et publiée le premier janvier 2002. Cette lettre qui garde toute sa pertinence a pour titre : ” Rodrigues 2002. Réussir l’autonomie.” Je suis heureux ce soir d’accueillir ceux et celles qui sont les premiers responsables de l’île Rodrigues autonome: le chef Commissaire, Mr Serge Clair et son épouse , les commissaires , le ‘minority leader’ Mr Gaetann Jhabemeesur et son épouse, Mr le Président de l’Assemblée Régionale et son épouse , les députés de l’Assemblée Régionale et Nationale et Mr ‘L’Island secretary’.
La beauté et la richesse de notre République Mauricienne arc en ciel- qui dans la bible est le signe de promesse- est qu’elle est composée de plusieurs îles et de plusieurs peuples. A côté de notre grande Sœur l’île Maurice il y a l’île Rodrigues, Agaléga mais aussi le peuple Chagossien en exil forcé loin de leurs îles. Je voudrais ce soir saluer le leader des Chagossiens, Mr Bankoo ainsi que la délégation Chagossiens, présents parmi nous et avec nous ce soir pour cette messe.
Chers frères et Sœurs de Rodrigues, avec nos forces et nos limites, nos capacités et nos faiblesses, nous nous sommes mis en route comme Vicariat Apostolique depuis aujourd’hui 14 ans. Rendons grâce au Seigneur pour sa présence au milieu de nous afin que nous puissions répondre à notre vocation : être sel et lumière de l’évangile au sein de la société rodriguiase et apporter notre contribution à la mission que Jesus confie à son Eglise d’aller annoncer la Bonne Nouvelle dans le monde entier.
Au nom des chrétiens de Rodrigues et en mon nom personnel , je voudrais exprimer à Mgr Maurice Piat toute notre joie et toutes nos félicitations pour la confiance que le pape François lui fait en le nommant cardinal. Il s’agit d’une grande responsabilité car il sera un proche collaborateur du successeur de L’apôtre Pierre. Nous rendons grâce et nous prions pour lui. Le Seigneur, une nouvelle fois, l’invite à pousser vers le large et même vers le grand large afin d’aider Pierre à tirer les filets. Alors que nous venons de fêter le quatorzième anniversaire de l’autonomie de L’île Rodrigues, nous n’oublions pas que Mgr Piat a toujours cru dans les capacités des Rodriguais. Il a eu un rôle si important pour que l’Eglise à Rodrigues soit reconnue dans son originalité, accède au statut de Vicariat Apostolique, et ainsi puisse apporter sa contribution au sein de la communion des Eglises, de la catholicité. Nous souhaitons que le plus vite possible, le cardinal Maurice Piat puisse venir nous visiter et qu’ainsi nous ayons
L’occasion de célébrer l’Eucharistie à la Cathédrale saint Gabriel et avoir aussi la joie de le rencontrer.
ARTICLE PARU DANS LE MAURICIEN | 11 NOVEMBRE, 2017 – 10:00
Cela fait 15 ans que vous avez été nommé évêque de Rodrigues, quel est votre regard sur ce parcours ?
J’ai pris comme devise épiscopale « Vous êtes sel de la terre et lumière du monde ». C’est aussi la devise de l’église de Rodrigues qui a été érigée comme vicariat apostolique, après le passage à l’autonomie. Cela nous invite à prendre au sérieux toute la réalité humaine. Et au cœur de ces réalités, de donner le goût de l’Évangile au cœur de nos actions. C’est dans ce sens que j’essaie d’aider l’Église à progresser.
Cela se traduit de plusieurs manières. La première concerne l’engagement auprès des plus pauvres. Cela se fait principalement à travers l’œuvre de Caritas. Nous avons toute une équipe de volontaires qui font un travail extraordinaire. Caritas Rodrigues a depuis toujours mis l’accent sur trois points : aider les personnes à se prendre en main par de petits projets économiques, de même que l’aide au logement ; favoriser l’éducation des enfants et des jeunes à travers tout un projet alimentaire – nous aidons chaque jour plus de 300 élèves du primaire et du secondaire pour avoir un repas et nous avons également tout un plan pour aider les étudiants au bas de l’échelle à poursuivre leurs études universitaires et techniques à Maurice ; enfin, la troisième dimension de l’aide caritative concerne les aides d’urgence.
La deuxième dimension pour être sel de la terre et témoin de l’Évangile au sein de la société rodriguaise concerne tout le projet éducatif. Feue Antoinette Prudence et Irlande Alfred ont lancé le projet pédagogique connu comme l’Inclusive Pedagogy. Cet effort se poursuit aujourd’hui avec une jeune manager, Dr Annick Tolbize, une spécialiste en pédagogie qui a fait ses études aux États-Unis, et toute une équipe. Nous visons le développement intégral de chaque enfant qui nous est confié.
Un troisième axe est à travers le mouvement d’actions catholiques qu’est le centre Carrefour, dont la cheville ouvrière a été Antoinette Prudence. Nous continuons cette intuition qu’elle a eue. À l’occasion des 15 ans de l’autonomie, il y a eu toute une réflexion menée par le centre dont le thème était « Comment remplissons-nous le panier de l’autonomie ? » Cela a été un temps pour évaluer les avancées et identifier les difficultés. Au cours de la messe marquant les 15 ans de l’autonomie, j’ai fait une présentation de cette réflexion. Comme vous le savez, nous avons une grande préoccupation ici, c’est l’eau. La semaine dernière, les forces vives se sont réunies au centre Carrefour pour réfléchir à ce sujet et ont fait des propositions concrètes au commissaire de l’eau. Bien sûr, le travail se fait également dans les paroisses à travers les prêtres et la présence des religieuses. Par exemple, elles ont pris depuis peu ce qu’on appelait auparavant le shelter et qui accueille les enfants en difficultés. Voilà autant d’exemples qui montrent comment l’église essaye d’apporter son petit grain de sel dans la société rodriguaise. Bien sûr, nous n’avons pas le monopole de l’action, mais nous apportons notre contribution.
Sur le plan pratique, qu’est-ce qui change maintenant que Rodrigues a son propre évêque ?
De tout ce que j’ai partagé, il y a bien des choses qui avaient commencé avant moi et qui se poursuivront bien après moi. Mais, je pense que le fait que le Pape Jean Paul II ait institué le vicariat est une reconnaissance pour l’Église à Rodrigues. Cela démontre qu’elle a une certaine maturité. Cela se traduit concrètement pour nous au sein de la CEDOI, où nous avons beaucoup à partager et à recevoir. Cette reconnaissance nous invite également à prendre des responsabilités et à prendre notre mission plus au sérieux.
Quel constat faites-vous des 15 années de l’autonomie ?
Il est toujours dangereux de faire des jugements globaux sur une société. La situation est complexe et c’est facile de tomber dans les slogans. Néanmoins, ce qui est évident, c’est que la société rodriguaise vit de grandes mutations. Et cela a des conséquences sur les personnes, les mentalités et notre manière de vivre en société. Je prendrais deux exemples : aujourd’hui, chaque Rodriguais a un téléphone portable. Et même si le débit est lent, la grande majorité des personnes sont connectées aux réseaux sociaux. Cela a des conséquences très positives car Rodrigues n’est plus cette petite île isolée, nous avons accès à l’information. Mais il y a aussi l’aspect négatif. Par exemple, toute la question de pornographie, le palabre institutionnalisé et surtout, l’information brute, sans le filtrage d’une analyse journalistique.
La deuxième grande mutation est que nous sommes entrés, à Rodrigues, dans la société de consommation. Là encore, il y a le côté positif, avec l’accès à des biens et le confort. Mais il y a aussi le côté négatif avec le surendettement des familles. Certaines institutions siphonnent nos familles par les emprunts frisant l’illégalité. Je crois qu’il faut situer l’autonomie dans tout ce contexte-là.
Pour répondre plus directement à la question, je pense qu’il y a eu beaucoup de progrès réalisés. Tant dans le domaine des infrastructures et de l’environnement. Par exemple, il y a eu l’interdiction des sacs en plastique, la fermeture de la pêche à l’ourite et aussi, il y a une conscience écologique générale. Beaucoup de visiteurs disent que Rodrigues est une île propre.
De même, je dois faire ressortir le progrès sur le plan de l’éducation. Les jeunes Rodriguais sont de plus en plus nombreux à poursuivre leurs études jusqu’en HSC et au-delà. Sur le plan culturel, il y a une grande affirmation de l’identité rodriguaise. Mais je pense que nous sommes aussi en face de nombreux défis. J’en mentionnerai quatre : le plus grand défi, c’est toute la question de l’écologie et de l’aménagement du territoire. Deuxième défi, c’est l’attention aux plus pauvres. Alors qu’une partie importante de la population rodriguaise vit dans une certaine aisance aujourd’hui, il y a encore au moins 10 000 personnes qui vivent de la Sécurité sociale. Un autre défi est le civisme dans le quotidien de la vie. Et enfin, il y a toute la question de la démocratie participative. J’avais souligné ce point dans ma lettre pastorale l’an dernier, intitulée Politique et miséricorde. Comme je le disais : la démocratie ne consiste pas uniquement à faire appel au vote tous les cinq ans, mais à permettre aux citoyens de donner leurs avis, de participer pleinement aux décisions, bien évidemment, en tenant compte du choix politique de la majorité.
Je pense qu’en nous appuyant sur une solide tradition de volontariat, nous sommes invités tous à favoriser la participation à tous les échelons. Je crois que c’est un grand défi pour continuer à poursuivre, à favoriser la consolidation de l’autonomie. De même, le captage et la distribution d’eau demeurent un grand challenge. Pour ce qui est de l’emploi, actuellement l’industrie du bâtiment tourne à plein régime, mais ce qu’il nous faut, c’est la création d’emplois stables.
Comment avez-vous réagi à la réponse brutale du ministre mentor, sur la question de l’eau, lors de sa visite à Rodrigues récemment ?
Je préfère ne pas trop commenter cela, car je ne sais pas dans quel contexte exactement il a fait cette déclaration.
Revenons à l’emploi. Est-ce que l’exode des Rodriguais vers Maurice est toujours aussi important ?
C’est difficile à dire car il n’y a pas de statistiques à ce sujet. Et par ailleurs, comme je le disais, il y a une grande demande de main-d’œuvre dans le secteur de la construction. J’aurais plutôt tendance à dire qu’actuellement, il y aurait peut-être un ralentissement de l’exode des Rodriguais vers Maurice, en ce qui concerne les adultes. Mais je pense tout de même qu’il y a encore beaucoup de jeunes terminant leur scolarité à Rodrigues qui vont chercher un emploi à Maurice. Le profil a probablement légèrement changé. Mais ce n’est qu’une impression que je ne peux confirmer.
À Maurice, on est en pleine réforme du système éducatif. Comment Rodrigues se situe par rapport à cela ?
Personnellement je pense que l’idée de la réforme est une bonne chose car on ne peut à la fin de six années de primaire décider de l’avenir d’un enfant. C’est bien de donner un temps plus long à l’enfant de développer ses compétences et aller au moins jusqu’à la Form 3. Mais par contre, je me demande comment des enfants qui terminent le cycle primaire, sans maîtriser les éléments fondamentaux comme la lecture, l’écriture et les mathématiques – et il y en a beaucoup – vont réussir en quatre ans ce qu’ils n’ont pas réussi au primaire. Deuxièmement, je me pose la question s’il ne faut pas proposer comme une école de la deuxième chance pour ceux en échec scolaire. Pour le moment, je n’ai pas les éléments prouvant que cette réforme va aider ces enfants.
Les écoles catholiques à Maurice ont aussi le projet Kleopas qui est entré en vigueur. Est-ce qu’à Rodrigues vous avez un projet similaire ?
Notre programme à nous, comme je l’ai mentionné plus tôt, c’est la pédagogie inclusive. Nous continuons à creuser dans ce sens. Bien sûr, avec des idées nouvelles. En même temps, nous travaillons pour un renouvellement de la catéchèse au niveau du primaire.
Est-ce qu’il y a la nécessité pour un collège catholique à 100 % à Rodrigues ?
Comme vous le savez, nous avons un collège œcuménique, avec le diocèse anglican et qui marche très bien. Il y a une très belle collaboration entre les deux Églises. Mgr Ian Ernest et moi travaillons en étroite collaboration. Le manager est un révérend anglican. Le recteur est catholique, le président du board aussi. Il y a une bonne entente. Je crois que c’est un beau témoignage d’œcuménisme. À travers cette œuvre, nous faisons vivre à nos jeunes, les valeurs de l’Évangile.
Vous avez représenté Mgr Piat au Synode de la famille à Rome. Quelles en sont les retombées pour la famille rodriguaise ?
Je voudrais d’abord faire part d’un constat : dans cette île Rodrigues en mutation, la famille traverse une crise. Il y a moins de mariage et davantage de divorces. Entre autres causes du divorce, il y a le fait qu’aujourd’hui les femmes sont plus indépendantes économiquement et certaines n’acceptent plus le machisme de certains hommes. Ce qu’elles subissaient avant n’est plus acceptable aujourd’hui.
Il faut aussi reconnaître que les grandes mutations au sein de la société brouillent nos repères traditionnels. Il faut bien le reconnaître, il y a aussi un laxisme au niveau des mœurs sexuelles. Par rapport à toute cette crise, j’ai écrit une lettre pastorale dont le titre est La beauté du mariage. Beaucoup de personnes me disent que cette lettre a été l’occasion pour une prise de conscience de l’importance de la famille comme base de la société. Nous avons eu dans beaucoup de paroisses des rencontres de couple, des partages. Je pense que cette lettre peut aussi être un signal pour un nouveau départ. Car je constate également avec joie qu’il y a beaucoup de jeunes qui se préparent pour le mariage, qui veulent s’engager.
Nous avons aussi à Rodrigues de nombreuses familles monoparentales. Comme c’est le cas dans le monde entier, elles sont les plus vulnérables, touchées par la misère. Il y a des mamans qui font grandir plusieurs enfants seules, souvent dans des conditions héroïques. C’est aussi le travail de l’église de savoir valoriser, encourager ces mamans. Ce n’est pas la forme de famille que nous souhaitons, mais ce sont des familles qui sont là. Il y a toute une approche humaine, d’empathie, qu’il faut avoir envers elles pour les encourager dans leurs tâches éducatives. Ce sont un peu des deux grands axes des retombées de ma participation à Rome. D’une part, diagnostiquer la crise des couples et proposer des réflexions pour une prise de conscience ainsi que des actions pour consolider. Et le deuxième axe, c’est d’être au service des familles en difficultés et non pas les stigmatiser. C’est pour cela que j’aime dire : tou fami se fami.
Il y a eu récemment un premier cas d’écart d’un prêtre rodriguais. Comment avez-vous vécu cela ?
Je l’ai vécu avec beaucoup de peine. Un jeune homme que j’avais ordonné prêtre a quitté le ministère. Cela a été une souffrance pour moi et pour l’église à Rodrigues. Mais je trouve que c’est important de ne pas juger. J’ai cheminé avec ce prêtre et je souhaite de tout cœur qu’il trouve sa place dans la société et l’église. Nous n’avons pas le droit de juger ce qui se passe dans son cœur. Il est important qu’il n’y ait pas de stigmatisation.
Votre nom a été cité dans certains milieux comme l’éventuel successeur de Mgr Maurice Piat. Comment réagissez-vous à cela ?
J’ai été nommé par Jean-Paul II au service du vicariat apostolique de Rodrigues. C’est une grande responsabilité et une mission très dynamisante pour ma personne. Je travaille avec une équipe de prêtres, de religieuses, de laïcs formidables et je pense que ma mission n’est pas terminée. Je souhaite de tout cœur poursuivre cette mission à Rodrigues.
Votre mot de la fin ?
Pour situer la mission de l’Église, il nous faut situer la mission du Christ. Autrement, l’Église serait un peu comme une ONG. J’ai beaucoup de respect pour les ONG, mais l’Église n’en est pas une. Elle est appelée à se laisser guider par son fondateur. Plus je médite l’Évangile, plus je prends conscience que Jésus ne correspond pas à l’image que nous nous faisons habituellement d’un « religieux », dans le sens d’un professionnel de la religion. Dans son enseignement il n’y a pas de rubrique concernant le déroulement de la liturgie, de la prière ou encore concernant des règles de pureté. L’impureté pour Jésus vient du cœur, là où se complotent les coups tordus ! Dans l’enseignement de Jésus, il n’y a pas non plus un catalogue de règlements pour régenter nos vies. L’intérêt de Jésus est ailleurs. Ce qui le passionne, c’est de mettre l’homme debout en inventant une nouvelle manière de vivre avec Dieu et entre nous. Pour reprendre une phrase d’un beau chant de Brel, ce que Jésus nous propose, c’est de construire « un monde où l’Amour soit roi ! » Dans son langage Jésus appelle cette réalité le « Royaume de Dieu ».
Au début de la création, nous dit le livre de la Genèse, Dieu notre Père, par la puissance de l’Esprit, ‘modela l’homme avec la poussière prise du sol… et le Seigneur Dieu l’établit dans le jardin pour le cultiver et le garder’. (Gen 2vs 7.15 ) Ce fut ainsi le début d’une longue histoire, la longue marche de l’humanité, et qui se poursuit à travers les siècles. Nous avons été créés nous dit la Bible ‘à l’image et en vue de sa ressemblance’ , ce qui implique une croissance continue de l’humanité . Sur ce chemin d’humanisation, le même Esprit a suscité Jésus , le Nouvelle Adam, dans le sein de la Vierge Marie, cette fille de Galilée: « L’Esprit Saint viendra sur toi Marie, et la puissance du très haut te prendra sous son ombre; c’est pourquoi celui qui va naitre sera saint, il sera appelé Fils de Dieu.( Luc 1 vs 35)Si Adam, après sa rupture avec Dieu, nous tire vers le bas, Jesus lui, ‘le Fils de l’homme’ nous tire vers le haut!
Adam, après sa rupture avec Dieu,nous tire en effet vers le bas. Adam est le symbole même de l’humanité qui se méfie de Dieu, qui le prend pour un concurrent, pire pour un ‘pharaon’ qui au fond ne veut pas son bonheur! Nous en connaissons les conséquences dramatiques : division entre Adam et Eve, ( entre l’homme et la femme) meurtre d’Abel par son frère Cain, division entre les peuples et les cultures symbolisée par la tour de Babel . Par ailleurs, les humains, au lieu ‘de veiller sur la création’, se comportent souvent comme des prédateurs avec toutes les conséquences écologiques que nous connaissons.
Jésus, l’homme nouveau, le nouvel Adam, nous tire vers le haut!
Le nouvel Adam, Jésus, a une confiance illimitée en Dieu son Père qu’il nomme ‘Abba.’ Jésus est une humanité ‘transparente à Dieu’, tellement transparente qu’il dira à Philippe: ‘Celui qui ma vu a vu le Père.’ ( Jn 14vs9 ) N’est -ce pas la raison pour laquelle le pape François nous invite, spécialement durant cette année, à contempler sur le visage de Jésus, la miséricorde même de Dieu : ‘misericordiaie vultus’. Cette confiance absolue en Dieu son Père qui est Amour, fait de Jésus un homme tout donné, un homme entièrement tourné et au service des autres, n’hésitant pas à nous laver les pieds. C’est la route que Jésus nous invite à prendre pour réaliser notre humanité: vine ban vrai zom, ban vraie femme! La fête de l’Assomption nous rappelle que la Vierge Marie, celle qui avec ses yeux de croyante a contemplé de si près le visage de la miséricorde, elle qui a emprunté le chemin de la miséricorde à la suite de Jésus, a été tirée vers le haut. Oui, la Vierge Marie avec son corps et son âme vit pleinement et éternellement en Dieu. La Vierge Marie, dans sa chair, nous indique ainsi le but de notre voyage terrestre : l’assomption en Dieu.
Le réaménagement du site de Marie Reine de Rodrigues est comme une parabole écrite avec les roches et la terre, les briques, le fer et le ciment. En effet, cette architecture nous permet de nous réunir autour de la Vierge Marie comme des enfants réunis autour de leur maman. Le demi cercle de l’amphithéâtre nous fait penser que la Vierge Marie, telle une maman, enserre tous ses enfants dans ses bras . La vierge Marie, elle qui fut présente à la naissance de l’Eglise à la pentecôte, nous invite surtout à nous tourner avec elle vers l’autel où Jésus le Christ, le Fils bien aimé de Dieu, nous donne sa vie, après nous avoir parlé à travers les Saintes-Écritures, afin que nous vivions notre vie ‘ pas comme bane n’importe’ mais comme des fils et filles de Dieu. Ce matin encore , comme à Cana en Galilée, la Vierge Marie nous dit :« faites tout ce qu’il vous dira’ . Or, à chaque messe Jésus nous dit : « faites ceci en mémoire de moi » Luc 22vs 19 , c’est à dire, faites que, comme moi et à ma suite, votre vie soit une vie toute donnée. Ce matin, adressons cette prière à la Vierge : «Marie Reine de Rodrigues, prie l’Esprit Saint avec et pour le peuple de Dieu qui se trouve à Rodrigues afin que nous puissions accueillir la miséricorde de Dieu en accueillant Jésus et ainsi en être tes témoins par toute notre vie. »
Durant toute cette année, nous avons découvert que la miséricorde ne peut se résumer à une simple dévotion ! Etre miséricordieux c’est rejoindre une personne ( une famille ou un groupe) dans sa misère physique , morale , psychologique, économique ou spirituelle pour lui manifester notre solidarité , notre affection , notre amitié et surtout notre engagement d’être à ses côtés pour l’accompagner. Nous nous engageons ainsi à l’aider pour qu’elle puisse surmonter, mais le plus souvent vivre , une épreuve, une fragilité, une contradiction ou un échec’.(lettre pastorale 2016)
Cette année nous célébrons ‘la fête la vierge’ à un moment où notre pays en général et, les éleveurs en particulier, traversent une grande épreuve avec l’épidémie de la fièvre aphteuse. Nous tous ici rassemblés ‘lors Canon’, nous voulons dire aux éleveurs notre profonde sympathie et notre solidarité. Mardi dernier ene éleveur dire moi : ‘ mo zanimo sa meme mo la banque. letan mo besoin faire ene developpement mo vende ene zanimo, si enan ene problème la santé dans famille ek besoin ale Maurice mo vende ene zanimo.’ Une dame me disait un peu dans le meme sens: «nous zanimo représente ene l’avenir, sa même nous ressource.»Au-delà du grave problème économique, un manque à gagner considérable pour les familles concernées et le pays, il s’agit de toute une tradition rodriguaise , ( une manière de vivre, un corps de métier) qui est sérieusement ébranlée. De nombreuses têtes de bétail sont abattues chaque jour. Nous pouvons imaginer le drame vécu par les éleveurs. Un éleveur me disait « mo le coeur faire mal letan touille mo zanimo », ou encore cet enfant qui disait à sa maman: « mame mo besoin ale guete mo boeuf.… mo désolé » Dans cette famille, comme dans de nombreuses familles rodriguaises, chaque enfant est propriétaire d’un animal et doit en prendre soin. Il y a un lien très fort entre les éleveurs et leurs bêtes . il y a par ailleurs le risque du découragement. Un jeune qui s’était lancé dans l’élevage et qui a perdu ses bêtes disait: « pas pou nourri encore! »
Bien évidemment, nous qui croyons en un Dieu de miséricorde , nous ne pouvons pas imaginer une seule minute qu’il s’agirait ,comme le proclame les faux prophètes, d’une malédiction et d’une punition de Dieu et qui ‘Bondie fine abandonne nous’. Par ailleurs, cette réflexion d’un cultivateur lue sur Facebook disant: « bien bon pou zot , astere zot kone souffrance ! » n’est pas digne d’une personne qui se réclame du Christ et c’est tout a fait en contradiction avec le message de miséricorde proclamé et vécu par Jésus.
Dans l’adversité la grandeur d’un peuple se reconnaît à sa capacité de s’unir pour relever les défis. Certes toute la vérité doit être faite concernant l’introduction du virus à l’ile Rodrigues et le(s) responsable(s) doit être sanctionné. Malheureusement la kot enan malheur, enan corbo !Nous besoin vigilant pour qui penan dimoune profite sa moment là pou faire profit malhonnête.
Le moment est à la mobilisation. Mobilisation en ayant des paroles de fraternité et d’encouragement pour ceux et celles qui sont directement impliqués dans cette catastrophe. Mobilisation en étant solidaire avec les éleveurs, tout d’abord en achetant de la viande produite localement. (certes avec les garanties des autorités sanitaires que le viande est comestible.)Mobilisation en étant solidaire également de tous ceux et celles qui sont sur le terrain tous les jours pour tenter d’enrayer la propagation de l’épidémie. Mobilisation en ayant le souci du bien commun, comme par exemple, en ne déplaçant pas les animaux mais aussi en obéissant aux dispositions mises en place pour enrayer l’épidémie. Mobilisation en respectant les pâturages, ce qui n’est pas toujours le cas de la part de certains qui, sans aucune autorisation, y introduisent leurs animaux. Je fais un appel à tous les catholiques de Rodrigues, à tous les habitants de l’ile Rodrigues, afin de nous comporter comme des citoyens responsables.
Une fois l’épidémie enrayée, comment relancer le secteur de l’élevage à Rodrigues économiquement et en tenant compte également d’autres facteurs? Il sera alors urgent d’avoir une large consultation pour trouver ensemble, avec les tous les acteurs concernés, des solutions innovantes qui, en même temps sauvegardent la tradition de l’élevage par les familles et en même temps soient résolument tournées vers l’avenir. Dans ma lettre pastorale ‘ politique est / et miséricorde’ je faisais la suggestion suivante : « Organiser la gestion de la terre en aménageant des zones pour l’agriculture et d’autres pour l’élevage ( les conflits, souvent violents et sources de grande frustration, entre agriculteurs et éleveurs freinent le développement de ces deux secteurs) mais aussi des espaces verts et des zones d’habitat. Le ‘tout béton ‘ aurait des conséquences extrêmement graves pour l’équilibre de notre société et le développement économique de l’île, plus particulièrement le tourisme. Promouvoir un développement durable, donc le respect de l’environnement, est un enjeu majeur pour l’avenir de l’île Rodrigues ». Pourquoi, dans un grand élan d’unité rodriguaise, ne pas partager nos idées, unir nos efforts, pour sortir gagnant de cette grande épreuve. Aurons-nous cette grandeur d’âme pour dépasser nos clivages et penser d’abord Rodrigues ?
La fête de l’Assomption est une fête de l’Espérance. Inventons demain en faisant preuve de solidarité aujourd’hui. Inventons demain en unissant nos forces aujourd’hui. Inventons demain en disant et en vivant ce slogan imaginé par les enfants de l’ACE en 2009 : ensemble nou capave. Au cœur de cette grande épreuve, comme Marie, a nous rentre dans la miséricorde, en œuvrant ensemble pour le bien commun. Ainsi Jésus nous tirera vers le haut, nous grandirons en humanité, nous sortirons grandis de cette épreuve et nous poursuivrons notre route, en tant que peuple, vers le Royaume de Dieu. Amen
Il y a plusieurs années de cela, le Cardinal Jean Margéot , alors en visite à Rodrigues , et moi même, avions été invités par Mr Augustin Jolicoeur à une partie de pêche . Très tôt un lundi matin, nous nous sommes rendus à Graviers. Ton Augustin nous attendait dans sa pirogue , debout, sa gaule à la main. Le ciel était d’un bleu pastel, la mer était d’un grand calme et limpide et j’apercevais au loin les brisants .Sur la plage dorée par le soleil levant était assise une maman et son petit enfant. Un chien courait dans tous les sens et sautait de joie. Je fus comme saisi par une telle beauté ! Le lendemain à la messe , le Cardinal, à ma grande surprise, partageait à la communauté rassemblée qu’il avait vécu un moment de grâce hier matin au bord de la mer : soudainement,disait-il , Il s’était retrouvé au bord du lac de Galilée après la résurrection de Jesus et ce dernier était présent .
Je vous partage cet événement de ma vie qui peut paraître bien banal mais qui en fait peut nous faire comprendre que l’expérience de la beauté est comme une fenêtre qui s’ouvre et qui nous fait apercevoir , plutôt entrevoir, la Beauté par excellence : Dieu. L’expérience de la beauté nous fait expérimenter et ,pour ainsi dire , toucher du doigt la présence réelle de Jésus Ressuscité , comme l’a vécu le Cardinal ce matin là! Jésus est l’image même de la beauté de Dieu. Beauté non pas du style top modèle sur papier glacé ! Beauté qui se manifeste alors même que son visage est tuméfié sous les coups du déchaînement de la violence. ‘Voici l’homme- ecce homo.’
Pour mieux me faire comprendre je voudrais faire appel à une autre expérience, l’expérience de la lumière. La lumière nous éclaire, nous réchauffe, et sans lumière pas de végétation possible ni non plus de toute autre forme de vie. Pourtant la lumière, qui pour ainsi dire nous enveloppe et qui est si vital pour notre existence, est invisible à nos yeux ! C’est grâce à l’arc en ciel que nos yeux, avec émerveillement, découvrent les différentes couleurs qui composent la lumière. L’arc en ciel en réfractant la lumière nous permet, pour ainsi dire, de découvrir avec nos yeux son mystère. De même, les différentes formes de beauté que nous pouvons expérimenter reflètent, réfractent, la Beauté par excellence en nous faisant découvrir toutes les nuances de cette Beauté infinie. Dieu qui est invisible à nos yeux, lui qui nous entoure de sa présence, sans qui nous n’existerions pas, nous fait découvrir sa Beauté / sa Bonté infinie (même racine dans la langue hébraïque) à travers les expériences de beauté/ de bonté.
Ainsi, la beauté de la nature nous fait pressentir la grandeur du Créateur. Après avoir créé la terre, la végétation, Dieu, nous dit le livre de la Genèse, vit que cela était bon/ beau. De saint Gabriel, en prenant la route vers Songes, du village de Battu – madame, nous pouvons admirer la passe de Port Sud-Est qui vient comme enlacer l’îlot de l’Ermitage. Cette beauté de la nature nous fait pressentir la bonté / beauté du créateur qui nous offre gratuitement un tel spectacle! ” Dieu vit que cela était beau” (livre de la Genèse)
Les artistes, à travers toute leur créativité – le son d’un tambour, une peinture, un slam – nous mettent en contact avec celui qui est la source même de toute créativité et qui ne cesse de faire jaillir de la nouveauté et de la beauté.” Les artistes sont des artisans de beauté.”
Davantage encore, Dieu, par la puissance de l’Esprit Saint, créé l’Eglise- tel un Arc en ciel – pour refléter / réfracter la beauté de son image révélé en Jésus, à travers les générations. (l’arc en ciel, après le déluge , est le moyen artistique employé par Dieu pour manifester son alliance à Noé ) .
En cette messe Chrismale, je voudrais partager avec vous, comment, à travers des témoignages, Dieu opère cette réfraction, tout comme l’arc en ciel réfracte la lumière, et nous fait ainsi découvrir les différentes nuances (couleurs! ) de sa bonté/ beauté :
- Contemplons la beauté du visage des enfants, de tout enfant. Prenons le temps de nous émerveiller devant un bébé. Nous découvrons alors la beauté de l’innocence qui en fait réfracte l’innocence même de Dieu, lui qui, tel un bébé, ne peut pas faire de mal, qui est incapable de faire souffrir. Par ailleurs, les enfants par leurs réflexions nous permettent d’entrer plus profondément dans le mystère de Dieu. Ainsi ce garçon de la paroisse de la Ferme qui, répondant à une question du père Teddy Labour, affirmait que dans miséricorde il y a misère et ‘ la corde.’. Évidemment il a tort au plan de l’étymologie mais, en fait, il a par ailleurs profondément raison! La miséricorde n’est ce pas en effet Dieu qui nous envoie une corde ( en l’occurrence Jesus ) pour nous retirer du trou de la misère!
- La beauté / bonté de cette épouse qui accueille de nouveau son époux qui avait déserté le toit familial durant de longues années alors qu’il est gravement malade. Elle lui pardonne, le soigne, et l’accompagne avec beaucoup d’amour dans la dernière étape de sa vie terrestre. Cette épouse qui a toujours été fidèle à son engagement pris par le sacrement de mariage réfracte / reflète la miséricorde de Dieu.
- La beauté de ce vieux couple- les visages burinés par le poids de l’âge – qui s’aime comme au premier jour de leur rencontre il y a plus de 60 ans de cela. Leur attention l’un pour l’autre qui se manifeste très discrètement par des gestes de tendresse et de délicatesse réfracte/ reflète l’amour fidèle de Dieu, la tendresse de Dieu pour chacun d’entre nous.
- La beauté de l’engagement des religieuses / des religieux et des laïcs au cœur de la société pour faire reculer les différentes formes de misères – économiques, culturelles , relationnelles et spirituelles- réfracte/ reflète cette attention toute particulière de Dieu pour les défavorisés et les plus misères.
- La beauté d’une vie toute donnée de prêtre (dont le célibat en est le signe) au service de l’Eglise afin qu’elle accueille, annonce et célèbre l’Evangile reflète / réfracte l’amour pastoral de Jésus – lui le bon Pasteur- pour son peuple. Les prêtres, ministres/serviteurs des sacrements, témoignent par toute leur vie ce Père prodigue qui accueille ses enfants pêcheurs, les console, les soutient, les pardonne, guérit leurs blessures, les nourrit par Jésus ‘ MISERICORDIAE vultus.’ Cette huile des malades que je vais bénir au cours de cette messe est bien le signe que Dieu notre Père, par Jésus, vient nous rejoindre jusque dans notre agonie, notre mort, pour nous prendre par la main et nous conduire sur la rive de la vie éternelle.
Nous avons également la chance de vivre cet après midi dans la cathédrale de Saint Gabriel la beauté de la liturgie qui nous donne ainsi un avant goût de la liturgie céleste.
Comment ne pas être sensible à la beauté de ce texte du prophète Isaïe que nous venons d’entendre et par qui Dieu promet libération à tous les ‘misères’ de la terre? Comment ne pas être sensible à ce geste tout simple et si lourd de sens que nous allons revivre: Jésus prit le pain, le rompit ….Jésus se fait pain pour nous donner sa vie afin que nous puissions vivre notre vie comme des fils et filles de Dieu ?
Comment ce soir ne pas être transporté par ces beaux chants polyphoniques grâce à cette belle chorale composée de chanteurs de différents coins de l’île et diriger avec tant de talents par Chantelle Baptiste ?
En cette messe Chrismale ces chants polyphoniques sont tout un symbole ! En effet , au sein de l’Eglise ‘polyphonique ‘ , l’évêque ainsi que ses proches collaborateurs , les prêtres ,ont pour mission de veiller à ce que chaque voix puisse chanter sa partition , en les encourageant et en les valorisant. Notre mission est aussi de veiller à ce que aucune voix n’étouffe les autres voix et donc que chacun soit à l’écoute des autres voix. Surtout notre mission est de veiller à ce que toutes les voix chantent la même mélodie : le beau chant de l’Evangile. Nous serons les témoins crédibles de la beauté de la miséricorde si tout d’abord, entre nous, nous vivons cette miséricorde en nous accueillant ,en nous soutenant et en nous valorisant les uns les autres et aussi en nous pardonnant.
En cette messe Chrismale, je remercie les pères Daniel, Teddy et Jean Bernard de leur collaboration. Prions ce soir aussi pour le père Alex actuellement en formation, ainsi que pour les pères Lélio et Luc René en mission, sans oublier notre séminariste Jean Rex.
Oui frères et sœurs en Christ, comme disait Dostoievski, ce grand écrivain russe : “la Beauté sauvera le monde.” Amen.
Dieu , depuis la nuit des temps , prend l’initiative et créé des liens d’amitié avec les peuples de différentes cultures et civilisations. Dieu a franchi une étape importante dans ce désir de se faire proche de nous en entrant en dialogue avec un petit peuple, Israel, les descendants d’Abraham, d’Isaac et de Jacob . Dieu veut approfondir cette conversation d’une manière plus intense , avec tous les peuples, par le mystère de Noel : La Parole Eternelle , à l’œuvre depuis les origines , prend corps en Jesus. L’apôtre Jean nous dit au chapitre premier de son évangile que ‘le Verbe ( la Parole) s’est fait chair et qu’il a habité parmi nous.’La Parole de Dieu crée le monde : ‘Dieu dit que la lumière soit! Et la lumière fut. ‘ nous révèle le livre de la Genèse.
La Parole de Dieu crée l’humanité : ‘ Dieu dit: faisons l’homme à notre image et selon notre ressemblance ‘ et ce fut la naissance de l’homme et de la femme.
La Parole de Dieu purifie le lépreux : ‘ je le veux , sois purifié’. ; pardonne la femme adultère : ‘ je ne te condamne pas , va et ne pêche plus’; ressuscite le fils de la veuve de Naim: ‘jeune homme , je te l’ordonne lève toi’.
La Parole de Dieu suscite du neuf, créé des liens, valorise, guérit, encourage . La Parole de Dieu est toujours bienveillante . Elle nous veut du bien.
En ce soir de Noel contemplons cette Parole qui a pris naissance parmi nous en Jesus et qui par toute sa vie: ses actions et son enseignement ,sa manière d’être et sa manière de faire , nous parle de Dieu et par qui Dieu nous parle.
Durant l’année à venir, nous allons vivre à Rodrigues 3 événements importants : les élections régionales, la réforme de l’éducation avec l’introduction du ‘ 9 years schooling’ et la réflexion sur le mariage dont l’enjeu est si important pour notre société.
Si nous voulons que le mystère de Noel ait un impact sur notre société , si nous désirons sincèrement accueillir l’Emmanuel -Dieu avec nous -alors nous sommes appelés à nous faire disciple de Jesus. Être disciple de Jesus , c’est mettre nos paroles en accord avec Jesus Parole de Dieu, faire que nos paroles soient comme l’écho de la Parole de Dieu
Malheureusement , que constatons nous trop souvent? Alors que la Parole de Dieu est bienveillante, notre parole ,contaminée par le péché est souvent malveillante, blessante, dévalorisante. ” La médisance n’est pas seulement une parole méchante en soi ; elle peut être aussi une parole vraie, dite avec une mauvaise intention » Nous constatons alors les dégâts : la médisance – parole faussée – détruit les liens, elle détruit tout court ! Elle est source de violence, ennemie de la paix. Les mots déviés de leur vocation ont ainsi la grande capacité de blesser , de tuer, de dévaloriser et ceci est d’autant plus vrai avec les moyens modernes de communication. Une mauvaise utilisation des réseaux sociaux, souvent en se cachant derrière l’anonymat , détruit les liens sociaux.
Être disciple de Jésus c’est nous laisser inspirer par la Parole de Dieu dans notre manière de prendre la parole. Être disciple de Jesus c’est actualiser la Parole Vivante par nos paroles .
Durant la campagne électorale que nous allons vivre , j’invite tous les politiciens, les partisans et les citoyens en général à se servir de la parole pour proposer des projets de société qui donnent sens à notre vie commune, à faire des propositions qui permettent à notre société de progresser. Certes, la parole doit nous permettre de critiquer et de contester les idées , les programmes et les comportements de nos adversaires . Par contre, en aucun cas nous ne pouvons porter des jugements de valeur sur leur personne , leur physique, encore moins sur leurs proches. Si le débat est légitime , une caractéristique même de la démocratie, calomnier un adversaire en le considérant comme un ennemi à abattre n’est pas compatible avec l’évangile.
Toute réforme de l’éducation en profondeur ne dépend pas uniquement des changements de structure ou de programme.Le vrai renouveau dépend davantage d’un changement de mentalité de la part des éducateurs : parents, professeurs et tout le personnel , politiciens et société civile. Que nos paroles traduisent un vrai souci de promouvoir une éducation inclusive en donnant à chaque enfant la possibilité de développer ses talents. Osons proposer des solutions innovantes pour les jeunes ayant des difficultés académiques. Que plus jamais nous puissions entendre des paroles blessantes et dévalorisantes telles : ‘ li ene zéro, ene catar, ene bon à rien…’
Ayons des paroles encourageantes pour les personnes engagées dans le mariage. Que nos échanges durant cette année nous aident à comprendre les vraies difficultés rencontrées par les couples, non pour juger, mais pour les accompagner et les aider à les surmonter . Que nos paroles valorisantes sur le mariage encouragent les jeunes à s’y engager car, pour une grande part, la stabilité de notre société dépend de la bonne santé du mariage.
Frères et sœurs de Rodrigues, je vous souhaite un joyeux Noel et une bonne année 2017 en ajustant nos paroles à la Parole de Dieu, Jesus.